Cette année marque un tournant important pour notre Centre de Soins, à la fois dans sa structure et sa gestion. Un changement d’équipe, des prises de décisions complexes et des travaux importants sont autant de points qui visent à nous améliorer pour mieux accueillir notre faune sauvage en détresse. Cela nous permettra de tenir jusqu’à la construction du futur Hôpital pour la Faune Sauvage dont le projet s’est enfin concrétisé également.

Une année particulière au niveau des accueils

Le Centre de soins de la LRBPO est l’unique structure en Région Bruxelloise à pouvoir recueillir des espèces sauvages indigènes. Le but est évidemment de les soigner et les relâcher dans leur milieu naturel. Nous avons aussi, des années durant, comblé un manque structurel en ce qui concerne les nouveaux animaux de compagnie (abrégés “NACs”, c’est-à-dire certains rongeurs et oiseaux, les furets, les reptiles et les arthropodes) à Bruxelles.

Pour la première fois depuis des années, le nombre d’accueils a diminué de manière significative : 3084 animaux contre 3459 l’année passée, ce qui équivaut à une baisse de 10%. Cependant, le nombre d’accueils reste bien élevé et ne remet absolument pas en question les difficultés humaines, structurelles et financières rencontrées au fil des années. En effet, l’ensemble des centres de soins du pays continue à recueillir de plus en plus d’animaux.

L’explication à cette diminution est notamment due à la baisse exceptionnelle d’activité du centre au mois de février, suite à une rupture brutale au sein de l’équipe des soigneuses. Même si nous sommes restés ouverts, le centre a fonctionné au ralenti, et cette “léthargie” a eu des répercussions jusqu’au mois de mai. On observe également une différence significative au mois d’août qui pourrait être expliquée par le fait que la canicule était bien moins prononcée en 2023 qu’en 2022.

On observe que la courbe des accueils d’animaux au cours de l’année suit tout de même une tendance bien similaire aux années précédentes. Le nombre d’animaux pris en charge augmente de façon exponentielle pour atteindre son maximum en juin, ce qui correspond à la période où, à la fois les oiseaux migrateurs ont rejoint nos régions, où les jeunes commencent à sortir du nid mais également où il y a plus de personnes à l’extérieur qui peuvent être à même de croiser un animal en détresse. Une fois les mois d’été terminés, les accueils baissent lentement jusqu’en décembre. La haute saison pour le Centre de Soins reste donc bien de mai à septembre, période très intense pour l’ensemble de notre équipe.

Evolution des accueils et les espèces accueillies

Comme chaque année, nous avons en grande majorité recueilli des oiseaux : 2665 individus ce qui constitue 86% des accueils. Les mammifères sont légèrement remontés avec 369 individus (12%), tandis que les autres animaux sont restés rares : 41 reptiles (1%) et 3 amphibiens (0%).
Lorsque l’on regarde la tendance des accueils de ces groupes d’animaux au long de l’année, on voit très clairement le pic que représentent les oisillons au mois de juin. On voit également la tendance que marquent les hérissons puisque ceux-ci arrivent principalement en mai (à cause des batailles entre les mâles territoriaux mais aussi, à cause des sorties de tondeuses automatiques), en juillet (première vague de juvéniles) et en septembre (deuxième vague de juvéniles).

Le top 10 des espèces indigènes sauvages accueillies en 2023 dans notre centre

L’espèce en plus grand nombre reste le Pigeon ramier, même s’il est redescendu à 510 individus. Le Hérisson d’Europe reste deuxième en ayant augmenté légèrement ses effectifs. On peut noter que nous avons reçu plus de corvidés et principalement des pies tandis que les mésanges charbonnières ont diminué de moitié. Le Renard roux se retrouve à nouveau dans le tableau alors qu’il était en 11ème position l’année dernière. Il faut remarquer que le Pigeon biset domestique n’est pas repris dans le tableau (ne faisant pas partie de la faune sauvage indigène) mais ses effectifs sont restés très élevés avec 842 individus accueillis en 2023 contre 840 en 2022.

Un chiffre surprenant que nous souhaitons mettre en avant : 132, c’est le nombre d’espèces différentes accueillies. Rares sont les structures de soins traditionnels (ex: vétérinaire ou refuge) qui peuvent affirmer recevoir une si large diversité. Chaque espèce demande donc une attention particulière par nos soigneuses, c’est un réel challenge pour nos structures de soins.
Parmi ces espèces, nous pouvons citer un Engoulevent d’Europe, un Lérot ou encore un Macareux moine!

Des animaux blessés venant de tout Bruxelles, mais pas seulement…

Localisé à Anderlecht, notre centre recueille des animaux de tout le pays, et même parfois d’au-delà des frontières. Plus de 70% des animaux viennent de la Région Bruxelloise et 16% viennent de la Région Flamande. Il est clair que la proximité joue un rôle essentiel pour les déposants.
Cela s’illustre tout particulièrement grâce à la carte suivante: un cinquième des animaux provient de la commune d’Anderlecht, qui n’est pourtant pas particulièrement verdoyante. Bien sûr, les autres communes vont aussi impacter les arrivées en fonction de leur superficie ou leur quantité d’espaces verts.

Un point sur la faune domestique et exotique

Près d’un tiers des animaux que nous recevons sont considérés comme des animaux domestiques ou exotiques : 842 pigeons bisets domestiques, 85 animaux d’espèces exotiques envahissantes et 133 autres animaux exotiques et/ou domestiques comme les perruches ondulées, les canaris, les serpents, etc. Cela fait bien un total de 1060 animaux sur 3084, ce qui est considérable. Parmi les espèces les plus exceptionnelles, on peut citer six mygales particulièrement dangereuses, un Boa constricteur, un jeune Caïman, ainsi qu’un Phalanger volant.

À l’exception des espèces exotiques envahissantes que nous ne pouvons pas remettre à l’adoption, nous envoyons ces animaux vers des structures plus adaptées (comme Carapace ou le Natuurhulp Centrum) ou bien nous les faisons adopter par des particuliers attentionnés.
Toutes ces démarches (prises en charge, entretiens, adoptions, transferts, etc.) prennent énormément de temps et nous empêchent de nous concentrer sur notre vocation première : le soin à la faune sauvage. D’autant plus que certains de ces animaux domestiques arrivent en juin, lorsque leurs propriétaires partent en vacances et les abandonnent derrière eux. Or, c’est aussi à ce moment-là que nous recevons la plupart des juvéniles d’espèces d’oiseaux sauvages qui nous demandent une attention toute particulière. Au vu de l’augmentation régulière du nombre d’accueils dans l’ensemble des centres de soins et de l’injonction de Bruxelles Environnement de réduire nos propres entrées, il a été décidé que nous n’accueillerons plus les animaux domestiques à partir du 1er janvier 2024. Cette décision a été très difficile pour l’ensemble de la Ligue (bénévoles, employés et Conseil d’administration) et ce d’autant plus qu’il n’existe aucune solution proche de Bruxelles pour les pigeons bisets domestiques.

Les causes d’accueil

Les causes d’arrivées des animaux au centre sont très similaires aux années précédentes : les juvéniles et les prédations représentent les chiffres les plus importants avec les causes inconnues. Nous avons cependant remarqué une augmentation des causes directement liées aux activités humaines qui pourrait être due au nombre d’hérissons blessés par une tondeuse automatique que nous avons accueillis. En effet, une grande partie de ces mammifères arrive avec des blessures surinfectées aux pattes ou à la tête. Certaines entailles ne trompent pas et c’est toujours une épreuve que de voir ces animaux souffrir le martyr en sachant qu’on ne pourra sauver qu’une très petite partie d’entre eux.
Une autre différence notable est la légère augmentation du nombre d’infections. En effet, il a fallu faire face à la grippe aviaire chez les oiseaux marins et les oiseaux d’eau mais également à une épidémie de variole chez les pigeons ramiers.

La prédation par les chats

L’année dernière a été particulièrement impressionnante concernant le nombre de prédations de chats. Cette année, fort heureusement, elles ont diminué pour retomber à un niveau similaire à 2021. Cependant, elles ont été plus meurtrières car seuls 15% des animaux prédatés ont pu être sauvés contre 17% l’année passée !

Ce qu’il advient des animaux recueillis au Centre

Cette année, nous avons pu compter sur l’aide précieuse du CREAVES de Namur qui a accepté de prendre en charge un nombre important d’animaux afin de décharger la nouvelle équipe de soigneuses lors de sa première année de soins. Et cela, en plus des animaux qu’ils ont pris en charge lors de la période de crise vécue par le centre en février.

Sur les 3084 animaux pris en charge par notre centre en 2023, 40,03% d’entre eux ont pu être relâchés, 14,45% ont été transférés vers des structures adaptées et 3,30% des animaux sont encore en soins. Plus dure réalité des chiffres, en 2023 nous avons comptabilisé 35,07% de décès après 24h au sein de notre centre et 7,14% des animaux ont dû être euthanasiés afin d’abréger des souffrances inutiles.

Soulignons qu’en 2023 le nombre de transferts fut bien plus élevé que les années précédentes. Cela est dû entre autre à deux facteurs :

  • suite à la période de crise connue par notre centre en février 2023, de nombreux animaux ont été transférés au CREAVES de Namur
  • notre nouvelle équipe de soigneuses a mis en place des pratiques différentes, par exemple pour certaines espèces, elles ont préféré directement les envoyer vers des structures encore plus spécialisées que notre centre

Notons également que le taux de relâchés une fois les transferts effectués approchant les 80%.

Le taux de réussite

Il est traditionnel pour l’ensemble des centres de soins en Belgique francophone de calculer leur “taux de réussite”, c’est-à-dire le nombre d’animaux ayant été revalidés par rapport au total d’animaux recueillis. Il faut cependant prendre de la distance par rapport aux chiffres qui sont ainsi calculés car il existe plusieurs méthodes pour ce faire et elles font grandement varier les résultats. Par exemple, le taux de réussite “brut” de cette année (c’est-à-dire le nombre d’animaux relâchés, transférés et adoptés par rapport à tous ceux qui sont décédés) est de 34%.

Pourtant, les centres ne calculent jamais de cette façon car une grande partie des animaux est malheureusement condamnée dès leur arrivée au Centre de soins. Ainsi, la grande majorité des centres omettent volontairement d’inclure les animaux décédés avant 24 heures. C’est la méthode que nous avons utilisée ici et qui nous donne donc un taux de réussite final de 56%. À titre d’information : d’autres centres retirent également les animaux euthanasiés après soins du calcul et le chiffre monte alors à 62%. Il y a donc bel et bien une différence notable entre les différentes méthodes de calcul.

Un avenir plein d’espoir

Après de nombreuses années de négociation et de plaidoyer politique, une très belle perspective s’offre enfin pour notre Centre de Soins : la possibilité de construire un nouvel hôpital pour la faune sauvage de Bruxelles. En effet, en décembre 2023, la Région Bruxelloise a marqué son accord pour l’achat d’un terrain à Ixelles pour y installer un nouveau centre de soins pour la faune sauvage.

La LRBPO est le seul opérateur spécialisé pour la prise en charge d’animaux sauvages en difficulté sur le territoire Bruxellois, nous répondrons donc au marché de concession qui sera lancé dans les prochains mois par Bruxelles Environnement Même si cela prendra encore beaucoup de temps et d’investissements, nous aurons la possibilité de repartir à zéro et d’élaborer une structure avec des équipements plus adaptés et du personnel encore mieux outillé.

Cette nouvelle perspective nous offre donc une chance inouïe pour continuer à assurer le bien-être des animaux sauvages en détresse. Et surtout, elle nous permet de sensibiliser les autorités et les citoyens sur l’importance d’avoir des espaces adaptés, des lieux spécialisés aux soins, et des locaux agencés en fonction des besoins des animaux et non plus l’inverse.

La nouvelle équipe

Plus de 70 bénévoles et volontaires nous aident à l’année pour le nourrissage, l’entretien des infrastructures, l’accueil des animaux, la permanence téléphonique et le transport d’animaux chez les vétérinaires ou vers leurs lieux de relâché. Les volontaires en service citoyen et les stagiaires participent activement au fonctionnement du Centre : ils assistent aux diagnostics des animaux, sont formés à la capture et à la contention des différentes espèces, au nourrissage des juvéniles, etc. En plus de toutes ces personnes que nous remercions du fond du cœur, cette année a été marquée par l’engagement d’une toute nouvelle équipe de soigneuses: Justine Dubucq, Lisa Rousselet et Luna Marez.