La nature va mal, de plus en plus mal, constate un groupe de 270 scientifiques belges qui réclame au Gouvernement des mesures pour sauvegarder la biodiversité. Plusieurs études scientifiques montrent que les oiseaux des campagnes disparaissent à une vitesse vertigineuse. Quant aux oiseaux des forêts, il en est de même pour les espèces nichant au sol où abondent cervidés et sangliers.

Hélas, nos dirigeants politiques ne semblent pas en prendre réellement conscience. Ils continuent de rêver de développements économiques, de satisfaire les producteurs d’une agriculture intensive et les amateurs de tableaux de chasse plantureux. Mettre fin à cette dégradation effarante de la flore et de la faune ne semble pas être, pour eux, une priorité. Cela apparaît clairement dans la composition du pôle « Ruralité », qui est chargé de remettre des avis sur la politique régionale relative à la protection et la conservation de la nature.

Pour éviter que les avis de ce pôle, censé représenter l’ensemble des citoyens, ne viennent contrarier leurs objectifs politiques, il a été formé à « géométrie variable ». Les variations dans la composition de cette assemblée permettent ainsi d’assurer le maintien des dérives de la chasse, de la pêche, de l’agriculture et de la sylviculture dans les atteintes qu’elles portent à la nature. Etant constitué au départ d’une base de 16 membres, le pôle passe à 33 lorsqu’il est question de chasse, afin qu’il comporte une majorité de 18 membres attachés à cette pratique et qu’il n’y ait qu’un seul représentant pour la sauvegarde de la nature. Le même scénario se répète également lorsqu’il s’agit de satisfaire pêcheurs, agriculteurs et exploitants de forêts. Mais, lorsque les avis à émettre concernent la nature, l’assemblée est alors réduite à 25 membres. Ainsi, les représentants pour la nature se trouvent en minorité et leurs avis ne doivent pas être pris en compte.

Et ce n’est pas tout ! En plus de cette mascarade de démocratie qu’est le pôle de la ruralité, il est maintenant question de dissoudre l’UAB (Unité Anti-Braconnage), service créé en 2003, et qui prouve, à suffisance, son utilité dans la lutte contre toutes les atteintes à l’Environnement. Rien qu’en 2017, les 8 agents spécialisés de l’UAB (service qui n’est pourtant pas au complet) ont dressé 512 procès-verbaux, saisi et rendu la liberté à 822 oiseaux, et constaté 80 infractions en matière de pêche, dont 50 effectuées de nuit. Cette Unité est aussi très efficace contre toutes les formes de braconnage (grenouilles, chevreuils, etc.), d’usage de pièges à mâchoires, de récolte de plantes protégées, d’infractions au bien-être animal. Mais elle dérange lorsque ses contrôles s’exercent sur les dérives de certains chasseurs fortunés qui s’adonnent au tir de cervidés sans déclaration, à la destruction d’espèces protégées et à des lâchers illégaux de gibiers.

Par cette dissolution, ces agents spécialisés du Département de la Police et des Contrôles, qui agissent dans toute la Wallonie, seraient envoyés dans le Département de la Nature et des Forêts, où leurs missions seraient restreintes au territoire de la Direction dans laquelle ils seraient affectés. Ce transfert perdrait certainement en efficacité pour poursuivre les associations de braconniers qui, elles, ne s’embarrassent pas de limites territoriales.

En fait, la composition non démocratique du pôle Ruralité et ce projet d’élimination d’un service, très utile à la répression des infractions, sont conçus pour couvrir et masquer bien d’autres atteintes à la nature :

– le non respect de la Directive en ne restaurant pas d’habitats suffisants pour la faune des plaines ;

– le maintien de la chasse à des espèces en danger d’extinction ;

– l’extension de la chasse, après le coucher du soleil et avant son lever, favorisant des tirs à l’aveugle sur des espèces protégées ;

– l’attribution de dérogations à la protection d’espèces durant leurs périodes de reproduction ;

– l’absence d’application du bien-être animal à des pratiques de chasse d’une barbarie sans nom ;

– etc, etc.

Tout cela résulte d’une orientation politique qui n’assume pas sa responsabilité, évidente et prépondérante, dans la dégradation de plus en plus catastrophique de la nature et de sa biodiversité.

Monsieur le Ministre, à vous qui avez en charge la protection et la conservation de la nature, la Ligue Royale Belge de Protection des Oiseaux vous demande, instamment, de revoir la composition du pôle de la Ruralité pour développer une vraie politique de protection et de conservation et que la Nature soit efficacement protégée par une Unité Anti-Braconnage, non seulement maintenue, mais renforcée.