Selon le nouvel Arrêté quinquennal sur la chasse, pris à l’initiative du ministre Willy Borsus, le renard peut être chassé en Wallonie les 365 jours de l’année, au moyen d’une arme à feu, depuis une heure avant le lever du soleil jusqu’à une heure après son coucher.
De plus, il peut être capturé au moyen de pièges, de nuit comme de jour. Tous les modes de chasse sont autorisés : battue, affût, approche, aux chiens courants et même au moyen de rapaces.
Le ministre de l’Agriculture est donc, lui aussi, sans pitié pour ce bienfaiteur qui, chaque année, élimine de 6.000 à 10.000 petits rongeurs qui ravagent les champs.
Des espèces très prolifiques
Le campagnol terrestre (Arvicola terrestris) vit essentiellement sous terre. Il se nourrit de racines. Le campagnol des champs (Microtus arvalis) est plus petit et s’attaque principalement aux pâturages.
Selon François Moutou, vétérinaire épidémiologiste (revue « 4 saisons » n°244) : « Le campagnol se reproduit dès qu’il a quatre semaines. Avec une gestation de trois semaines, la femelle peut avoir six portées par an de quatre à huit petits. Un seul couple peut engendrer plus de 100 individus d’avril à octobre, lesquels seront capables d’engendrer 5000 nouvelles têtes l’année suivante. Tous les trois, quatre ou cinq ans, selon l’espèce, on constate des pullulations. Le pic est suivi d’un effondrement : il n’y a plus rien à manger, ils se battent entre eux et limitent drastiquement leur reproduction l’année suivante. »
Des dégâts considérables
Lors du colloque sur le renard, organisé par l’Association pour la protection des animaux sauvages (Aspas) en 2017, un éleveur de vaches laitières, dans le Doubs, témoignait : « Nos pâturages sont couverts à plus de 50 % de trèfle blanc. Mais, cette plante avec ses nodosités qui fixent l’azote de l’air, a un ennemi : le campagnol des champs. En 2016, nous avons subi un pic de pullulation. Une densité normale, c’est de 50 à 150 campagnols/ha ; l’explosion de population dépassait les 800/ha. Sur notre ferme, la charge a été de 3000 € de foin acheté, 1000 € de resemis, avec un préjudice sur la santé des animaux et de lait non produit par les vaches qui ont eu une ration insuffisante. Le tout est estimé à 10.000 €. »
Le campagnol des champs, comme son nom l’indique, s’attaque aux pâturages, tandis que dans les potagers, il s’agit principalement du campagnol terrestre. Le campagnol des champs connaît des pullulations tous les trois ans, le terrestre plutôt tous les cinq ans. De sorte que l’on peut avoir l’impression d’être envahi de campagnols en permanence. Ces petits rongeurs se distinguent par leur appétit d’enfer pour les racines de nos légumes et de nos arbres fruitiers. Rongés par les racines, les jeunes pommiers, poiriers et autres fruitiers périclitent lamentablement, quand ils ne tombent pas au premier coup de vent (lire le n°245 de 4 saisons).
Accueillir les prédateurs
Autrefois, les pullulations de campagnols n’étaient pas considérées comme un fléau dans les régions dédiées aux herbages et à la pâture, car leurs prédateurs étaient largement présents dans les haies, bosquets et petits habitats qui encadraient les parcelles. Le remembrement des terrains agricoles et la destruction, par les chasseurs, des espèces qu’ils considèrent être nuisibles favorisent les pullulations des rongeurs.
La revue La Hulotte n°33/34 confirme : « Les études récentes des savants, effectuées à partir de l’examen de plusieurs centaines de contenus d’estomac, nous l’apprennent sans la moindre discussion possible : la belette – la minuscule belette – mange à elle toute seule environ 350 rongeurs par an… la chouette chevêche : 450… la hulotte : 640… l’effraie : 945… le putois : 1.000… Quant au renard, accusé de ne commettre des hécatombes que parmi les lièvres et les lapins de garenne, cela dépasse tout : ce satané Goupil dévore en fait entre 6.000 et 10.000 souris par an ! »
Enfin, ajoutons ce que déclare le Dr Johan Michaux de l’Université de Liège, dans le Livre blanc – Stop aux dérives de la chasse – : « Parmi les dérives les plus aberrantes de la chasse, il est à noter, entre autres, la destruction de nos populations de renards, sans aucun fondement scientifique. Au contraire, de nombreuses études récentes ont démontré que le renard constitue un allié de choix pour les agriculteurs, pour la lutte contre les pullulations de rongeurs. Le renard contribue également à limiter la propagation de la maladie de Lyme, maladie en pleine expansion dans notre pays, en régulant les rongeurs hôtes de la bactérie responsable de ce syndrome ».
Dès lors, pourquoi, Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement wallon, permettez-vous aux chasseurs un tel acharnement envers cet auxiliaire précieux pour l’agriculture et notre santé ?
Les affabulations de nemrods sur le renard sont-elles à ce point plus crédibles que les études scientifiques les plus sérieuses ?