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La tenderie en Belgique, ce n’est pas fini

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La tenderie, est officiellement interdite en Belgique grâce à un combat de longue haleine mené par la LRBPO. Pourtant, elle n’aura hélas été complètement arrêtée que durant un an. Une tenderie illégale continue, encouragée par une certaine complicité de nos gouvernants. Si, début des années septante, un point final avait été officiellement mis à la tenderie par le ministre Léo Tindemans, une année plus tard elle réapparaissait sous l’appellation « approvisionnement ». Il était nécessaire, selon nos ministres, de permettre à 3.100 tendeurs de se muer en éleveurs d’oiseaux. C’était un approvisionnement, en principe limité à une dizaine d’oiseaux par captureur. Cet approvisionnement devait être dégressif en nombre d’amateurs autorisés et en oiseaux capturés, pour aboutir, après cinq années, à une fermeture définitive de la tenderie.

La tenderie a pu perdurer grâce à un manque de volonté politique

Rêver d’une tenderie enfin éliminée, c’était méconnaître l’influence politique de ces quelques 3.000 captureurs, affiliés principalement à la Fédération ornithologique wallonne (FOW), nouvelle dénomination de la Fédération des tendeurs, basée à Liège. Cette association avait le soutien de tous les ministres wallons dont on observait la présence lors de son assemblée annuelle. C’est pourquoi, au bout des cinq années, le Gouvernement n’a pas tenu sa promesse et a permis au système de continuer. De plus en plus de nouveaux amateurs étaient admis. La cage à trébuchet, seule autorisée en Benelux pour la capture des oiseaux, était remplacée par divers assemblages constitués de « tissages ». Les arrêtés du Gouvernement évitaient d’utiliser le terme « filet » interdit. L’Administration s’est aussi rendue complice de cette tenderie, la rendant incontrôlable et illimitée, notamment en admettant que les oiseaux fraîchement capturés puissent être emportés sans que leur soient apposées immédiatement les bagues obligatoires.

En Wallonie, il y a plus d’oiseaux détenus illégalement que légalement.*

La légalité de la tenderie a été prolongée durant 20 ans

Chaque année, par un nouvel arrêté, le Gouvernement wallon continuait de favoriser cette tenderie faussement limitée. Et, chaque année, notre Ligue pour la protection des oiseaux en demandait l’annulation au Conseil d’État. Cette situation ubuesque serait certainement encore d’actualité si la Ligue n’avait obtenu, par le Conseil d’État, de disposer d’une astreinte de 10.000.000 francs (± 250.000 €) si un nouvel arrêté de capture venait à être publié au Moniteur. Depuis, plus aucun ministre ne s’est risqué à la publication de ce genre d’arrêté. La dernière tentative de relancer cette tenderie illégale, introduite par deux députés du parti Mouvement Réformateur (MR), n’a pas fait long feu.

Un soutien sournois

Depuis l’arrêt de cette mascarade des approvisionnements illégaux, la dissimulation des oiseaux obtenus par braconnage est facilitée. Tout d’abord par la suppression de l’obligation, pour les oiseleurs, de tenir un registre de leur élevage. La traçabilité des oiseaux nés en captivité n’est plus assurée et il devient ainsi plus aisé d’introduire dans la filière les oiseaux capturés dans la nature. La délivrance des bagues officielles d’élevage, utilisées aussi par les braconniers pour masquer leurs captures frauduleuses, ne se fait plus par l’Administration. Elle est confiée à des associations d’amateurs d’oiseaux, notamment à l’ancienne fédération des tendeurs. C’est ahurissant ! Avec une telle organisation contre nature, les contrôles par les agents de l’Unité anti-braconnage (UAB) sont rendus très difficiles. Depuis que cette unité spécialisée est, par sa compétence, parvenue à démanteler une association de tendeurs, de maquilleurs de bagues et de revendeurs, elle en a perdu son autonomie. Elle se trouve maintenant intégrée dans le Département de la nature et des forêts (DNF) où, affaiblie en nombre d’agents, il semble être question de la démanteler ou de répartir ses agents au sein des directions du DNF. Enfin, quand ils sont trouvés, les contrevenants écopent souvent de petites amendes, insignifiantes en rapport des gains obtenus par le trafic illégal d’oiseaux auquel ils se livrent.

Même si on ne parle que de quelques milliers d’oiseaux, on ne peut pas, on ne peut plus se le permettre. D’autant que ça ne profite qu’à quelques personnes qui exploitent les ressources naturelles pour se remplir les poches. *

Il est temps de mettre totalement fin à la tenderie

La Ligue Royale Belge pour la Protection des Oiseaux se mobilise pour que disparaisse enfin cette tenderie dévastatrice, mettant en grand danger de plus en plus d’espèces :

  1. Par une collaboration, la plus efficace possible, avec l’Unité anti-braconnage ;
  2. Que la délivrance des bagues officielles se fasse par l’Administration ;
  3. Pour obtenir un suivi précis des élevages d’oiseaux indigènes ;
  4. Faire interdire les concours de chant de pinsons, cause principale du braconnage de printemps ;
  5. Ne plus autoriser la détention d’espèces dont l’élevage est difficile.

Nous allons développer ces différentes mesures dans les prochains numéros de notre revue “l’Homme et l’Oiseau”

Référence :

*Revue Imagine – Hiver 2023

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