Un arrêt du Conseil d’État du 25 octobre dernier ayant annulé l’arrêté 2016-2021, concernant les dates d’ouverture, de fermeture et de suspension de la chasse, la Ligue Royale Belge pour la Protection des Oiseaux invite le Gouvernement wallon à ce que le prochain arrêté quinquennal soit limité à la catégorie «Grands gibiers».
Si des prélèvements restent indispensables dans les populations de grands mammifères, dont l’abondance est cause de dommages importants aux cultures agricoles et aux forêts, il n’en est plus de même avec la petite faune dont la plupart des espèces ne cessent d’être en diminution. Pour l’arrêt de la chasse à cette petite faune en difficulté, les personnes, consultées lors d’un sondage par la société LISTEN, se sont montrées favorables à plus de 90 %.
La Chasse aux petites espèces : c’est autoriser une activité non nécessaire, très polluante, d’une grande cruauté et portant atteinte à la biodiversité !
1) Sa pollution insidieuse : 15.000 porteurs d’un permis de chasse + 2.000 porteurs d’une licence, que l’on peut estimer tirer, chacun, un minimum de 70 cartouches (en France l’estimation est de 130) cela dépasse1.000.000 de cartouches dispersant chaque année plus de 30 tonnes de grains de plomb dans la Nature.
2) Son saturnisme morbide : Les oiseaux introduisent des grenailles dans leur gésier pour moudre la nourriture. Ceux qui avalent des grains de plomb sont ensuite atteints de saturnisme. 2.000.000 d’oiseaux seraient ainsi indirectement condamnés à mort par la chasse en Europe. Et, les nécrophages qui s’en nourrissent deviennent malades à leur tour.
3) Ses perturbations importantes : Les lâchers abondants d’oiseaux d’élevage, pour compenser la raréfaction des espèces les plus recherchées, perturbent fortement les restes de populations sauvages adaptées à leur biotope. Ils exercent également une pression destructrice sur nombre de petites espèces telles que : lézards, petits batraciens, jeunes reptiles, insectes divers, nids de petits oiseaux, … De plus, ces lâchers sont une maltraitance envers ces animaux inadaptés à la vie sauvage.
4) Son irrespect des souffrances : Le tir du petit gibier s’effectue, en grande partie, sur des oiseaux en vol. Il est estimé que de 30 à 40 % d’animaux, qui ne sont pas touchés par suffisamment de plombs, poursuivent leur fuite et, la plupart n’étant pas retrouvés, sont condamnés à périr misérablement en souffrance. L’usage de cartouches va, sans conteste, à l’encontre du bien-être animal, car ce n’est pas la méthode la meilleure pour éviter de faire souffrir les animaux. Il en est de même de l’usage du collet à arrêtoir qui étrangle partiellement, occasionnant blessures et souffrances durant des heures.
5) Sa dissémination de germes pathogènes : Des germes pathogènes se développent inmanquablement dans les volières où les oiseaux à relâcher (Colverts, Faisans, Perdrix) sont concentrés. Bien que les oiseaux traités paraissent sains, certains restent porteurs de germes de maladies qui peuvent affecter gravement les souches sauvages non immunisées. Selon un vétérinaire spécialisé dans ce domaine, l’histomose est commune dans les élevages de faisans. Les traitements sont la famille des imidazolés : metronidazole, ronidazole…, médicaments interdits pour tous les animaux destinés à la consommation humaine. Alors, bon appétit après la chasse !
6) Ses dégradations génétiques : Les espèces d’élevage sont habituellement la reproduction, en quantités, au départ d’un petit nombre de géniteurs. Libérer dans la nature ces sujets d’élevage ne peut qu’affaiblir les souches sauvages avec lesquelles ils vont se croiser. Une étude française concernant le Canard colvert a fait apparaître que, en une dizaine d’années, nombre de sujets sauvages présentaient une réduction de 10 % des lamelles dans le bec. Cette réduction des lamelles, qui leur sont nécessaires pour la filtration des vases, dans lesquelles ils recherchent leur nourriture, vient des croisements avec des sujets d’élevage. Cette évolution génétique a résulté de l’alimentation que reçoivent les canards en captivité, où les lamelles ne leur sont pas nécessaires.
7) Ses confusions inadmissibles : Des confusions se produisent aisément entre espèces chassables et protégées. C’est d’autant plus certain durant le crépuscule et à l’aurore. Dans la pénombre de plus en plus épaisse, surtout par temps couvert en fin d’automne, le Hibou moyen-duc, qui quitte l’orée de la forêt pour chercher un campagnol dans une prairie, risque de recevoir une volée de plombs, normalement destinée à une Bécasse. Il en est de même, lors de l’affût à la passée, pour toutes les espèces protégées de canards qui se mèlent souvent aux canards colverts. Tous les canards ont un vol très rapide qui laisse très peu de temps au chasseur pour les identifier. Encore faut-il qu’il sache les reconnaître. Un rapport du Muséum d’Histoire Naturelle de Paris, auquel les chasseurs renvoient les bagues trouvées sur des oiseaux, montre beaucoup d’erreurs d’identification des canards par les chasseurs, bien qu’ils aient eu les oiseaux en main et en pleine lumière. Les erreurs dépassent même un pigeon sur deux, entre le Colombin protégé et le Ramier.
8) Ses dérangements intempestifs : Les phragmitaies des milieux humides, notamment en queue d’étang, constituent des dortoirs importants pour nombre d’espèces d’oiseaux qui, inévitablement, sont dérangés par l’arrivée crépusculaire d’un chasseur, surtout si des coups de feu éclatent. Les oiseaux sont alors pris de panique et vont se poser ailleurs, au hasard, où ils risquent d’être des proies faciles pour les rodeurs nocturnes. De plus, de tels dérangements deviennent très graves, voire mortels, au fur et à mesure que s’installent le froid et la neige. Les oiseaux, épuisés et affamés, doivent réserver leurs déplacements pour la recherche d’une nourriture de plus en plus difficile à trouver.
9) Ses destructions illégales : La chasse ne se limite malheureusement pas aux espèces gibier. Toutes autres espèces, pouvant présenter une menace envers le gibier, si faible soit-elle, est inadmissible aux yeux des chasseurs. C’est pourquoi, chaque année, le DNF (Département de la Nature et des Forêts) accorde fort généreusement le droit de détruire quelque 50.000 Corneilles noires (49.976 en 2018) et 25.000 Pies bavardes (24.596 en 2018), bien que ces espèces soient très utiles à l’agriculture en débarassant les prairies et les cultures de vers blancs, larves du taupin et de la tipule, de coléoptères de tous genres, de chenilles, de limaces, … et aussi de cadavres divers. Le Corbeau freux lui n’est, en apparence, pas inquiété parce que sa destruction nécessite un avis favorable par la section Nature au Pôle ruralité. Mais, dans la destruction de 50.000 corneilles, il se trouve certainement beaucoup de jeunes freux dont la différence, avec la Corneille, est une infime distinction de longueur entre les 2èmes et 6èmes rémiges primaires. Quant aux rapaces, dont le statut de protection est le plus élevé, ils font aussi l’objet de destructions illégales. En exemple, le dernier carnage observé à Givry, où ont été abattus : 6 busards des roseaux, 5 buses variables et 2 faucons crécerelles. Des destructions qui compromettent la préservation d’espèces très menacées.
10) Ses mensonges éhontés : Les chasseurs se parent volontiers du titre de meilleurs protecteurs de la Nature. A les entendre, sans leur gestion de la faune, il résulterait de graves désordres écologiques. Heureusement, leurs affirmations sont totalement contredites par l’exemple du canton suisse de Genève où la chasse est abolie depuis 1974. Et il n’en est pas résulté les problèmes sanitaires et la disparition d’un grand nombre d’espèces animales, annoncés comme catastrophiques par les chasseurs. Au contraire, selon l’ancien Président de la Commission de la Faune : « Aujourd’hui, la faune de notre Canton est d’une richesse et d’une variété exceptionnelles ».
En conclusion :
La Ligue Royale Belge pour la Protection des Oiseaux.
Considérant qu’un suivi scientifique devrait accompagner le rétablissement important d’habitats, prévus dans la Déclaration de Politique Régionale, principalement pour la petite faune des champs ;
Considérant qu’un moratoire de la chasse aux petites espèces, d’une durée au moins équivalente au temps de rétablissement des habitats, s’avère nécessaire compte tenu de l’implication de cette pratique désastreuse dans la biodiversité de la Nature ;
Considérant que, en raison de leurs populations peu abondantes ou pour éviter de porter atteinte à des espèces semblables protégées, un arrêt de la chasse peut se justifier pour toutes les petites espèces ;
Considérant qu’un sondage récent par la société LISTEN révéle qu’une majorité très importante de la population serait favorable à l’abolition complète de la chasse ;
Propose :
Une suspension de la chasse aux catégories petits gibiers, gibiers d’eau et autres gibiers, d’au moins cinq années, en concordance avec la période de rétablissement des habitats nécessaires.
Vers une paix durable avec la Nature !