Selon un sondage récent, par la société LISTEN, 78 % de la population wallonne serait favorable à l’abolition complète de la chasse. Si des prélèvements restent indispensables dans les populations de grands mammifères, dont l’abondance est cause de dommages importants aux cultures agricoles et aux forêts, il n’en est plus de même avec la petite faune dont la plupart des espèces ne cessent d’être en diminution.

Pour l’arrêt de la chasse à cette petite faune en difficulté, les personnes consultées se sont montrées favorables à plus de 90 %.

La Chasse aux petites espèces : une activité très néfaste à la biodiversité !

1.  sa pollution insidieuse : 15.000 porteurs d’un permis de chasse + 2.000 porteurs d’une licence, que l’on peut estimer tirer, chacun, un minimum de 70 cartouches (en France l’estimation est de 130) cela dépasse1.000.000 de cartouches dispersant chaque année plus de 30 tonnes de grains de plomb dans la Nature.

2. son saturnisme morbide : Les oiseaux introduisent des grenailles dans leur gésier pour moudre la nourriture. Ceux qui avalent des grains de plomb sont ensuite atteints de saturnisme. 2.000.000 d’oiseaux seraient ainsi indirectement condamnés à mort par la chasse en Europe. Et, les nécrophages qui s’en nourrissent deviennent malades à leur tour.

3. ses perturbations importantes : Les lâchers abondants d’oiseaux d’élevage, pour compenser la raréfaction des espèces les plus recherchées, perturbent fortement les restes de populations sauvages adaptées à leur biotope. Ils exercent également une pression destructrice sur nombre de petites espèces telles que : lézards, petits batraciens, jeunes reptiles, insectes divers, nids de petits oiseaux, … De plus, ces lâchers sont une maltraitance envers ces animaux inadaptés à la vie sauvage.

4. son irrespect des souffrances : Le tir du petit gibier s’effectue, en grande partie, sur des oiseaux en vol. Il est estimé que de 30 à 40 % d’animaux, qui ne sont pas touchés par suffisamment de plombs, poursuivent leur fuite et, la plupart n’étant pas retrouvés, sont condamnés à périr misérablement en souffrance. L’usage de cartouches va, sans conteste, à l’encontre du bien-être animal, car ce n’est pas la méthode la meilleure pour éviter de faire souffrir les animaux. Il en est de même du collet à arrêtoir, qui étrangle partiellement, et des laces aux pattes.

5. sa dissémination de germes pathogènes : Des germes pathogènes se développent inmanquablement dans les volières où les oiseaux à relâcher (Colverts, Faisans, Perdrix) sont concentrés. Bien que les oiseaux traités paraissent sains, certains restent porteurs de germes de maladies qui peuvent affecter gravement les souches sauvages non immunisées. Selon un vétérinaire spécialisé dans ce domaine, l’histomose est commune dans les élevages de faisans. Les traitements sont la famille des imidazolés : metronidazole, ronidazole…, médicaments interdits pour tous les animaux destinés à la consommation humaine. Alors, bon appétit après la chasse !

6. ses dégradations génétiques : Les espèces d’élevage sont habituellement la reproduction, en quantités, au départ d’un petit nombre de géniteurs. Libérer dans la nature ces sujets d’élevage ne peut qu’affaiblir les souches sauvages avec lesquelles ils vont se croiser. Une étude française concernant le Canard colvert a fait apparaître que, en une dizaine d’années, nombre de sujets sauvages présentaient une réduction importante des lamelles dans le bec. Cette réduction des lamelles, qui leur sont nécessaires pour la filtration des vases, dans lesquelles ils recherchent leur nourriture, vient des croisements avec des sujets d’élevage. Cette évolution génétique a résulté de l’alimentation que reçoivent les canards en captivité, où les lamelles ne leur sont pas nécessaires.

7. ses confusions inadmissibles : Des confusions se produisent aisément entre espèces chassables et protégées. C’est d’autant plus certain durant le crépuscule et à l’aurore. Dans la pénombre de plus en plus épaisse, surtout par temps couvert en fin d’automne, le Hibou moyen-duc, qui quitte l’orée de la forêt pour chercher un campagnol dans une prairie, risque de recevoir une volée de plombs, normalement destinée à une Bécasse. Il en est de même, lors de l’affût à la passée, pour toutes les espèces protégées de canards qui se mèlent souvent aux canards colverts. Tous les canards ont un vol très rapide qui laisse très peu de temps au chasseur pour les identifier. Encore faut-il qu’il sache les reconnaître. Un rapport du Muséum d’Histoire Naturelle de Paris, auquel les chasseurs renvoient les bagues trouvées sur des oiseaux, montre beaucoup d’erreurs d’identification des canards par les chasseurs, bien qu’ils aient eu les oiseaux en main et en pleine lumière. Les erreurs dépassent même un pigeon sur deux, entre le Colombin protégé et le Ramier.

8. ses dérangements intempestifs : Les phragmitaies des milieux humides, notamment en queue d’étang, constituent des dortoirs importants pour nombre d’espèces d’oiseaux qui, inévitablement, sont dérangés par l’arrivée crépusculaire d’un chasseur, surtout si des coups de feu éclatent. Les oiseaux sont alors pris de panique et vont se poser ailleurs, au hasard, où ils risquent d’être des proies faciles pour les rodeurs nocturnes. De plus, de tels dérangements deviennent très graves, voire mortels, au fur et à mesure que s’installent le froid et la neige. Les oiseaux doivent réserver leurs déplacements pour la recherche d’une nourriture de plus en plus difficile à trouver.

9. ses destructions illégales : La chasse ne se limite malheureusement pas aux espèces gibier. Toutes autres espèces, pouvant présenter une menace envers le gibier, si faible soit-elle, est inadmissible aux yeux des chasseurs. C’est pourquoi, chaque année, le DNF (Département de la Nature et des Forêts) accorde fort généreusement le droit de détruire quelque 50.000 Corneilles noires (49.976 en 2018) et 25.000 Pies bavardes (24.596 en 2018), bien que ces espèces soient très utiles à l’agriculture en débarassant les prairies et les cultures de vers blancs, larves du taupin et de la tipule, de coléoptères de tous genres, de chenilles, de limaces, … et aussi de cadavres divers. Le Corbeau freux lui n’est, en apparence, pas inquiété parce que sa destruction nécessite un avis favorable par la section Nature au Pôle ruralité. Mais, dans la destruction de 50.000 corneilles, il se trouve certainement beaucoup de jeunes freux dont la différence, avec la Corneille, est une infime distinction de longueur entre les 2èmes et 6èmes rémiges primaires. Quant aux rapaces, dont le statut de protection est le plus élevé, ils font aussi l’objet de destructions illégales. En exemple, le dernier carnage observé à Givry, où ont été abattus : 6 busards des roseaux, 5 buses variables et 2 faucons crécerelles. Des destructions qui compromettent la préservation d’espèces très menacées.

10. ses mensonges éhontés : Les chasseurs se parent volontiers du titre de meilleurs protecteurs de la Nature. A les entendre, sans leur gestion de la faune, il en résulterait de graves désordres écologiques. Heureusement, leurs affirmations sont totalement contredites par l’exemple du Canton suisse de Genève où la chasse est abolie depuis 1974. Et il n’en est pas résulté les problèmes sanitaires et la disparition d’un grand nombre d’espèces animales, annoncés comme catastrophiques par les chasseurs. Au contraire, selon l’ancien Président de la Commission de la Faune : « Aujourd’hui, la faune de notre Canton est d’une richesse et d’une variété exceptionnelles ».

De la situation des gibiers concernés :

Petits gibiers :

Le Lièvre (Lepus europaeus) est devenu rare depuis que s’est développée une épidémie hémorragique venue de l’Est. Il ne devrait plus être chassé pour laisser l’espèce se reconstituer.

Le Faisan commun ou de Colchide (Phasianus colchicus) : Les lâchers sont illégaux, du fait que l’arrêté d’application de la loi autorisant les lâchers n’a jamais été établi. De toute façon, les lâchers se font habituellement la veille ou le matin même de la partie de chasse et non au moins un mois avant l’ouverture de la chasse, comme l’indique la loi. Cela démontre qu’une modification de cette loi, pour interdire totalement les lâchers, ne serait pas plus respectée qu’elle ne l’est actuellement. A noter que le Faisan étant très sensible à l’histomose, les médicaments de la famille des imidazolés qui lui sont administrés, en élevage, le rendent impropre à la consommation humaine. La seule possibilité de mettre fin à ces « tirs aux pipes » cruels, qui ne respectent pas le bien-être animal, est de ne plus ouvrir la chasse au Faisan.

La Perdrix grise (Perdix perdix) : Elle ne peut plus être ouverte à la chasse selon l’arrêt du Conseil d’État du 25 octobre 2019.

La Bécasse des bois (Scolopax rusticola) : En raison de sa faible densité comme nicheuse, elle n’est plus chassée en Flandre, ni à Bruxelles. Selon l’Atlas des oiseaux nicheurs de Wallonie, sa population est moindre que celle de la Perdrix grise jugée vulnérable. De plus, cette faible population est victime des densités exagérées de sangliers qui ravagent les nids et les poussins. La Bécasse ne doit plus être ouverte à la chasse, du moins tant que les densités de sangliers restent trop élevées.

Gibiers d’eau :

La Bernache du Canada (Branta canadensis) : Cette oie, introduite en Grande-Bretagne au XVIIe siècle comme oiseau d’agrément, s’est maintenant répandue librement dans nos régions où elle se comporte en espèce domestique. C’est d’ailleurs ce comportement qui lui permet de s’établir en zones urbanisées où elle bénéficie d’une relative protection qui favorise son expansion jugée envahissante. L’Atlas fixait sa présence entre 670 et 1.000 couples voici une dizaine d’années. Au moment de la mue, elle fait l’objet d’une régulation de sa population par le Service Public de Wallonie. Les oies capturées sont euthanasiées éthiquement, comme des animaux domestiques. Maintenir la chasse, au moyen de cartouches, irait à l’encontre du bien-être animal. Cette chasse ne doit plus être autorisée, mais : maintenir les captures par le S.P.W. lors de la mue.

Le Canard colvert (Anas platyrhynchus) : Comme chez le Faisan, la qualité génétique du Canard colvert sauvage est victime de lâchers importants d’oiseaux d’élevage qui ont une influence néfaste. De même, il n’est possible de voir disparaître ces lâchers, intempestifs et nuisibles, qu’en n’ouvrant plus la chasse à cette espèce.

La Sarcelle d’hiver (Anas crecca) : Cette espèce ne peut plus être chassée en raison de l’arrêt du Conseil d’État du 25 octobre 2019.

La Foulque macroule (Fulica atra) : Il est étonnant de trouver cette espèce à la chair désagréable dans les gibiers. Sa chasse ne se justifie pas, d’autant que l’Atlas n’en compte que 2.400 couples, tandis que la Gallinule poule d’eau, avec ses 6.000 couples, est protégée !

Autres gibiers :

Le Pigeon ramier (Columba palumbus): Le Pigeon ramier est le seul des petits gibiers dont la population est encore assez importante. Néanmoins, ne plus ouvrir cette espèce à la chasse permettrait d’éviter les confusions avec le Pigeon colombin, protégé, et qui se mèle souvent aux groupes de ramiers.

Le Lapin (Oryctolagus cuniculus) : Le lapin est une espèce proie à maintenir pour les prédateurs naturels. En raison de la myxomatose, il a perdu son abondance d’autrefois. Dans les rares endroits où sa présence causerait encore des dommages importants, les prélèvements nécessaires ne devraient se faire que par furetage, au moyen de bourses qui le capturent sans mal. Les sujets capturés serviraient à repeupler des sites où il a été décimé par la maladie.

Le Renard (Vulpes vulpes) : Comme la majorité des prédateurs, il adapte son territoire aux ressources dont il peut disposer. Avec le vrai petit gibier sauvage, il n’est pas l’ogre que l’on prétend, sinon comment expliquer que, dans le Canton de Genève où il n’est plus chassé depuis 45 ans, la faune soit devenue d’une richesse et d’une variété exceptionnelles ? Laisser Goupil en paix est important, car sa préférence va à la capture des petits rongeurs (de 6.000 à 10.000/an). Tuer un renard, c’est chaque fois créer un déséquilibre local. Il sera inmanquablement remplacé rapidement par un autre qui n’aura pas nécessairement les mêmes habitudes de prédation. Établir un moratoire de la chasse à la petite faune doit inclure aussi le Renard.

Le Chat haret (Felix catus) : C’est un chat domestique qui s’aventure parfois loin dans la campagne. Ce qui ne l’empêche pas de revenir s’alimenter dans le village. C’est un prédateur redoutable qui ne craint que certains renards qui osent l’affronter. De plus, il dégénère gravement le chat forestier (Felix sylvestris) avec lequel il se croise. Pour éviter les méprises avec le chat forestier, la capture de cet intrus domestique doit se faire à l’aide de cages. Comme pour la Bernache du Canada, le Ragondin, le Rat musqué …, c’est une tâche à confier à un Service du S.P.W.

En conclusion : La Ligue Royale Belge pour la Protection des Oiseaux

Considérant qu’un suivi scientifique devrait accompagner le rétablissement important d’habitats, prévus dans la Déclaration de Politique Régionale, principalement pour la petite faune des champs ;

Considérant qu’un moratoire de la chasse aux petites espèces, d’une durée au moins équivalente au temps de rétablissement des habitats, s’avère nécessaire compte tenu de l’implication de cette pratique désastreuse dans la biodiversité de la Nature ;

Considérant que, en raison de leurs populations peu abondantes ou pour éviter de porter atteinte à des espèces semblables protégées, un arrêt de la chasse peut se justifier pour toutes les petites espèces ;

Considérant qu’un sondage récent par la société LISTEN révèle qu’une majorité très importante de la population serait favorable à l’abolition complète de la chasse ;

Propose :

Une suspension de la chasse aux catégories petits gibiers, gibiers d’eau et autres gibiers, d’au moins cinq années, en concordance avec la période de rétablissement des habitats nécessaires.

Vers une paix durable avec la Nature !