C’est l’heure pour l’équipe du Centre de Soins pour la Faune Sauvage de Bruxelles de publier son traditionnel bilan annuel. Analyser l’évolution des accueils, leurs causes, les changements en matière de soins ou encore les sauvetages réalisés, sont des étapes essentielles pour conscientiser le grand public et nos autorités à l’impact réel de notre travail.

Bilan 2024 du Centre de soins pour la faune sauvage
L’accueil des animaux au centre

Nombre global d'animaux (espèces sauvages indigènes, espèces domestiques et exotiques envahissantes)
Le Centre de Soins de la LRBPO est l’unique structure en Région bruxelloise à pouvoir légalement recueillir des animaux sauvages indigènes pour les soigner et les relâcher dans leur milieu naturel. Durant de nombreuses années, notre centre a comblé un manque structurel, en acceptant d’apporter également des soins pour certains animaux domestiques notamment des nouveaux animaux de compagnie (les “NACs”, c’est-à-dire certains rongeurs, les furets, les oiseaux exotiques , les reptiles et les arthropodes). Depuis le 1er janvier 2024, nous avons dû prendre la décision d’arrêter d’accueillir ces animaux au Centre de Soins. Cela a fortement impacté les statistiques d’accueil de cette année.

Le nombre global d’accueils a fortement diminué en 2024 : près d’un tiers d’arrivées en moins. L’arrêt de la prise en charge des animaux domestiques a eu un réel impact sur notre statistique générale d’accueil. Mais cet arrêt a surtout eu une influence positive sur nos soins à la faune sauvage. Nous avons pu nous consacrer à 100 % au bien-être des animaux sauvages ! Étant la seule structure habilitée à le faire en Région bruxelloise, nous devions nous recentrer sur ce service (gratuit) rendu à la population et à la nature.
Notons qu’une petite proportion d’animaux domestiques a encore été accueillie cette année au centre. Ces animaux étaient des cas particuliers, comme par exemple, des dépôts devant la porte du Centre de Soins, ou des animaux attrapés par les pompiers qui n’avaient pas d’autres solutions que de les déposer chez nous en urgence. Nous espérons qu’à terme, le Centre de Soins de la Ligue deviendra réellement un centre totalement dédié à la faune sauvage en détresse.

Enfin, afin d’avoir une vue plus exacte et significative de l’évolution des accueils des animaux sauvages au centre, nous vous présentons un dernier graphique qui reprend l’évolution de l’accueil des animaux sauvages indigènes depuis 2019.
Après plusieurs années de croissance, une faible diminution des entrées est constatée pour les animaux sauvages dans notre centre en 2023 et 2024. Une tendance surprenante, au vu des statistiques des 19 centres de soins en Wallonie qui montrent qu’ils reçoivent toujours plus d’animaux. Une hypothèse pour expliquer cette baisse serait la confusion entre les différentes espèces de pigeons. Nous craignons qu’il y ait une confusion entre les ramiers (sauvages) et le fameux pigeon des villes (domestiques), que nous n’acceptons plus depuis janvier 2024.
Evolution des accueils au cours de l'année

Les arrivées au Centre de Soins augmentent de façon impressionnante au mois de mai, pour atteindre son pic en juin. De manière générale, la haute saison pour le Centre de Soins s’établit de mai à septembre. À cette période, ce sont une dizaine d’animaux qui entrent par jour en moyenne au Centre de Soins, avec, en 2024, un maximum de 27 animaux arrivés en une seule journée (le 10 mai 2024). C’est durant cette saison d’activité maximale que les oiseaux migrateurs rejoignent nos régions, que les jeunes commencent à sortir du nid et que d’autant plus de personnes à l’extérieur sont susceptibles de croiser un animal en détresse. Une fois l’automne arrivé, les accueils baissent doucement jusqu’en décembre.

Blongios nain
Les espèces et individus remarquables
Blongios nain, Oreillard roux, Fauvette babillarde, Pic mar, Autour des palombes, Bondrée apivore et un Sanglier.

" Top 10 " des espèces accueillies
Au total, ce sont 85 espèces d’animaux sauvages différentes qui sont arrivés au Centre de Soins cette année, ce qui équivaut presque au total de l’année passée (87 espèces). Comme chaque année, nous avons recueilli surtout des oiseaux avec 1489 individus, ce qui représente 77% des espèces sauvages. Le reste est constitué des mammifères avec 436 individus qui ont été recueillis au centre.





L'accueil des renards roux augmente de façon inquiétante

Le nombre de goupils accueillis depuis 2015 est en très nette augmentation. Cela nous amène à plusieurs réflexions relativement inquiétantes.
Cette affluence peut s’expliquer par l’augmentation de la population de renards à Bruxelles. En effet, ce sont généralement les espèces les plus communes et/ou les plus visibles que nous recevons au centre. De plus, un très grand nombre d’individus était porteur de la gale, cette maladie qui revient typiquement lorsqu’il y a un grand nombre d’individus concentrés au même endroit.

L’augmentation de la population de goupils est également due au fait que les renards établissent leur territoire en fonction de la nourriture disponible. Or, il y a beaucoup de possibilités pour se nourrir en ville : poubelles, nourriture pour animaux domestiques en extérieur, etc. Ce qui signifie que la taille des territoires a tendance à diminuer et à permettre à de plus en plus de nouveaux individus de s’établir dans Bruxelles.
Nous craignons pour l’avenir de l’espèce ! Si la population continue de croître, la proximité avec l’humain augmentera également, tout comme les problèmes potentiels de cohabitation.
Pour que le renard reste protégé et ne passe pas au statut de “nuisible” avec autorisation de destruction des individus, nous appelons la population bruxelloise à adapter ses comportements envers la faune sauvage.
Rappelons qu’il est essentiel, pour les renards de Bruxelles et d’ailleurs, d’éviter que les particuliers les nourrissent et les accueillent volontairement chez eux ! Espèce opportuniste, elle s’adapte extrêmement bien et n’a pas besoin d’être nourrie. Enfin, cela peut clairement leur nuire à court terme (développement de maladies telles que la gale) et à moyen ou long terme (modification, voire disparition du statut de protection).
Des coûts importants pour notre centre….
Enfin le renard est un mammifère qui demande en général énormément de soins (accidents dûs au trafic routier, blessures causées par des pièges ou des barbelés, empoisonnements, etc.) et prend souvent du temps à être réhabilité. Comme les renards sont potentiellement porteurs de maladies, nos soigneuses sont dans l’obligation de prendre des précautions supplémentaires lors de leur manipulation. En 2025, une aile spécifique au Centre de Soins devra être réservée pour la quarantaine exclusive aux renards. Tout cela demande un coût important, aussi bien monétaire qu’en énergie et en temps pour notre équipe de soigneuses et de bénévoles.
Les causes d’accueil
On voit tout de suite que les jeunes gardent une place très importante dans nos accueils . En effet, au total ce sont 1137 jeunes qui sont arrivés au centre de soins cette année (avec un pic en mai et en août), ce qui équivaut à un peu plus de la moitié de nos accueils ! Certaines causes directement liées à l’homme sont en augmentation, notamment le trafic routier ou ferroviaire et les animaux piégés ou coincés.
L’impact humain sur la faune sauvage
En faisant la synthèse des causes directement liées à l’être humain, nous arrivons à presque la moitié du nombre d’accueils, 43% exactement. Pour arriver à ce résultat, nous avons additionné les chiffres des activités humaines, les collisions, les ramassages de juvéniles qui n’étaient pas nécessaires, les animaux piégés, les prédations de chats et de chiens, les empoisonnements ainsi que le trafic routier et ferroviaire.
Le devenir des animaux et taux de réussite

* Chiffre total des animaux accueillis au Centre LRBPO = 2131 - 203 animaux domestiques et exotiques = 1928 animaux sauvages indigènes
Rappelons qu’il existe plusieurs méthodes pour calculer le « taux de réussite » traditionnellement demandé aux différents Centres de Soins. Celles-ci peuvent donc faire grandement varier les résultats. Par conséquent, nous recommandons de prendre ces chiffres avec des pincettes.
Comme une grande partie des animaux est malheureusement condamnée avant leur arrivée au centre, le nombre d’animaux qui décèdent, de quelque manière que ce soit, dans les premières 24h suivant leur arrivée est retiré du calcul. C’est la méthode que nous utilisons chaque année et qui nous donne un taux de réussite de 48 % pour 2024. L’engagement de notre vétérinaire (un demi jour par semaine), d’une nouvelle soigneuse ainsi que l’arrêt des accueils de domestiques ont permis réellement que ce pourcentage atteigne cette valeur.
Ainsi sur les 1928 animaux sauvages* recueillis en 2024, 574 ont été relâchés dans la nature, 24 ont été transférés et une trentaine se trouve encore en soin. Comme expliqué, une très grande partie des animaux est malheureusement condamnée puisque 592 sont morts à leur arrivée ou dans les 24h qui ont suivi tandis que 291 ont été euthanasiés pour épargner des souffrances supplémentaires. On peut remarquer que ce dernier chiffre a encore diminué par rapport aux années précédentes ; cela montre une motivation de l’équipe à tenter le tout pour le tout avec la plupart des animaux reçus.
Un changement majeur !
Cette année, nous avons eu la chance de pouvoir engager une vétérinaire, la Dr Nathalie Lemmens, qui travaillait jusqu’ici bénévolement. Elle consacre actuellement une demi-journée par semaine à notre cause. Cela permet non seulement un meilleur suivi des animaux, mais aussi de réaliser plus de radios et de chirurgies simples mais salvatrices.
Tout cela représente évidemment un coût important mais l’évolution s’est fait ressentir de suite. L’équipe est d’autant plus motivée, y compris les stagiaires et bénévoles qui peuvent s’informer et constater des résultats concrets.
Conclusion
L’arrêt de l’accueil des animaux domestiques nous a permis de nous recentrer sur notre objectif premier : la sauvegarde des animaux sauvages indigènes.
C’est la première année, depuis très longtemps, que nos équipes se sentent enfin moins submergées par le nombre d’arrivées, de soins à réaliser et/ou d’adoptions ou de transferts à organiser.
Grâce à cette diminution de pression, les équipes ont notamment pu apprendre de nouvelles techniques de soins :
- empennage/entures, autrement dit greffes de plumes,
- élevage d’un très jeune marcassin jusqu’à sa diversification alimentaire sans qu’il ne soit apprivoisé
- revalidation complète d’une renarde fortement blessée par des barbelés
Et demain ?

Les renards étant de plus en plus nombreux, nous faisons le choix pour l’année 2025 de mettre en place une quarantaine spécifique à cette espèce. Cela nous permettra d’assurer la sécurité de nos soigneuses, bénévoles et stagiaires face à une zoonose non négligeable, l’échinococcose. Cependant, au vu des locaux actuels, nous serons très limités en moyens et en espace.
Nous continuons donc en parallèle à travailler sur notre grand projet d’Hôpital pour la Faune Sauvage à Ixelles. Cela prend forme progressivement. La collecte de fonds est lancée, et nous avons besoin plus que jamais du soutien des autorités et des particuliers pour permettre à cette structure ultra équipée et de grande capacité de voir le jour. La faune sauvage bénéficiera grandement de ces nouveaux locaux, imaginés et conçus avec soin.

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