Si le braconnage évoque souvent les espèces exotiques, cette pratique illégale reste malheureusement bien ancrée en Belgique. Pour lutter contre ce fléau, l’Unité Anti-Braconnage (UAB) du Département de la Nature et des Forêts (DNF) wallon mène un travail acharné au quotidien. Mais face à la complexité des cas et des réseaux impliqués, la collaboration avec d’autres acteurs de la lutte anti-braconnage est indispensable. Parmi ces alliés essentiels, les CREAVES jouent un rôle clé à plusieurs niveaux.
Les CREAVES, acteurs-clés dans la lutte anti-braconnage
Le braconnage en Belgique, un problème persistant
Malgré l’interdiction de la tenderie en Belgique obtenue par la Ligue il y a plus de 30 ans, la capture illégale d’oiseaux se pratique encore de manière extensive dans notre pays. Un rapport émis par BirdLife en 2022 en atteste : la Belgique se classe parmi les trois pays européens où le nombre d’oiseaux capturés ou tirés illégalement par km² est le plus élevé (hors zone méditerranéenne). Les motifs de ces captures sont le plus souvent pécuniaires : élevage, trafic vers d’autres pays, ou encore concours de chants.
Les mammifères ne sont pas en reste : les captures illégales de gibier, par exemple, sont également courantes, que ce soit pour leur viande ou simplement pour les trophées.
L’Unité Anti-Braconnage, une cellule spécialisée au sein du DNF
L’Unité Anti-Braconnage (UAB) se rattache au Département de la Nature et des Forêts (DNF) du SPW Agriculture Ressources Naturelles et Environnement. Cette unité compte 14 agents, spécifiquement formés pour faire respecter les lois environnementales, avec une spécialisation sur le braconnage organisé à finalité commerciale.
Concrètement, les agents de l’UAB sillonnent le territoire wallon pour enquêter sur des cas de capture illégale, et faire le nécessaire pour verbaliser les contrevenants. Leurs missions consistent, entre autres, à intervenir sur le terrain, contrôler les domiciles, fournir des preuves et saisir les animaux concernés.
Une réelle force d’intervention, capable de se mobiliser pour des trafics de grande envergure
Si l’ampleur du braconnage est difficile à cerner pour un citoyen, l’UAB confirme son importance en Belgique :
“Chaque année, ce sont plusieurs centaines d’oiseaux que nous découvrons dans de tristes états. Les tendeurs n’ayant pas un stock fixe mais travaillant avec un flux continu, les chiffres de saisies varient très fort d’une année à l’autre, pouvant aller de 300 à 1500 par an. On en trouve chez des particuliers ou lors de concours de chants d’oiseaux, notamment celui du Pinson. Il peut y avoir des échanges illégaux derrière la buvette du foot, après un match. Les lieux sont variables. Le commerce reprend beaucoup d’ampleur.” indique Emilien Vincent, responsable de l’Unité Anti Braconnage.
Aujourd’hui, une réforme des services est annoncée, et pourrait affaiblir l’unité. Emilien Vincent souligne à quel point cela serait dommageable pour la faune sauvage :
“Une des affaires les plus marquantes, pour moi, reste l’affaire ayant mené à la reconnaissance, par la Cour d’appel de Liège dans son arrêté du 26 mai 2021, de l’existence du préjudice écologique et de sa réparation. C’est une affaire où l’UAB a joué un rôle clef, aux côtés des services de police, et participé au démantèlement d’un vaste trafic d’oiseaux chanteurs capturés dans la nature en région verviétoise et où quatorze prévenus ont été poursuivis. C’est dans ce genre d’affaires et dans son aboutissement que l’on voit l’importance de notre service et la nécessité de laisser le service opérer ensemble. Un éventuel démantèlement de notre unité serait catastrophique pour les agents mais surtout pour la nature qui se verrait privée d’une réelle force d’intervention, capable de se mobiliser pour des trafics de grande envergure.”
Aujourd’hui, une réforme des services est annoncée, et pourrait affaiblir l’unité. Emilien Vincent souligne à quel point cela serait dommageable pour la faune sauvage :
“Une des affaires les plus marquantes, pour moi, reste l’affaire ayant mené à la reconnaissance, par la Cour d’appel de Liège dans son arrêté du 26 mai 2021, de l’existence du préjudice écologique et de sa réparation. C’est une affaire où l’UAB a joué un rôle clef, aux côtés des services de police, et participé au démantèlement d’un vaste trafic d’oiseaux chanteurs capturés dans la nature en région verviétoise et où quatorze prévenus ont été poursuivis. C’est dans ce genre d’affaires et dans son aboutissement que l’on voit l’importance de notre service et la nécessité de laisser le service opérer ensemble. Un éventuel démantèlement de notre unité serait catastrophique pour les agents mais surtout pour la nature qui se verrait privée d’une réelle force d’intervention, capable de se mobiliser pour des trafics de grande envergure.”
Les CREAVES, pierre angulaire de la lutte anti-braconnage
De par leur nature et leurs activités, les CREAVES, ou Centres de Revalidation des Espèces Animales Vivant à l’État Sauvage, jouent plusieurs rôles cruciaux pour soutenir la mission de l’UAB. Ces structures se trouvent, en effet, au premier plan pour repérer ou obtenir des informations concernant des activités illégales, et constituent un lieu d’accueil pour les animaux saisis par la justice en fin de procédure.
Des informateurs de première ligne
Les CREAVES représentent dans l’esprit collectif un point de contact accessible pour toute question relative à la faune sauvage. Il n’est donc pas rare pour ces centres de recevoir des dénonciations, ou des informations relatives à des activités suspectes, de la part de particuliers.
L’état de certains animaux arrivant dans ces centres peut également permettre de détecter des pratiques illégales. Un oiseau aux plumes coupées net peut révéler, par exemple, dans certains cas, que l’oiseau a été utilisé comme appelant pour en attirer d’autres dans des filets (braconnage par « tenderie »).
L’arrivée de nichées complètes peut, quant à elle, révéler une potentielle destruction de nids. Bien que cette pratique ne soit pas du braconnage en soi, elle constitue une infraction à la Loi sur la conservation de la nature et fait partie du champ d’action de l’UAB. Restera à l’unité la tâche parfois complexe de déterminer si cette destruction est volontaire (et donc illégale), ou non.
Finalement, c’est aussi vers les CREAVES que se tournent parfois des personnes détenant des animaux sauvages chez elles pour avoir des conseils sur les soins à leur apporter. L’occasion se présente alors pour les CREAVES de rappeler que la détention d’espèces sauvages par des particuliers est interdite par la loi, et de proposer la prise en charge des animaux en question. Si le CREAVES se voit opposer un refus, il sera contraint de dénoncer le cas à l’UAB.
L’accueil des animaux saisis
Les CREAVES sont les seules structures habilitées à détenir des animaux sauvages en Wallonie. Lorsque des confiscations d’animaux ont lieu suite à un jugement ou sur instruction du Procureur du Roi, l’UAB se tourne donc vers un centre pour y déposer les espèces saisies.
Selon les cas, les animaux pourront être relâchés (suite à une décision de justice), ou devront être gardés s’il est établi qu’ils constituent une pièce à conviction.
Témoignage de Léa Christiaans, co-gestionnaire du CREAVES Le Martinet à Theux
“Nous avons malheureusement régulièrement des saisies qui arrivent au CREAVES. C’est sidérant de voir à quel point l’homme est prêt à tout, y compris à blesser et à torturer des animaux pour son propre profit. Au mois d’octobre, nous avons reçu pas moins de trois saisies dont deux arrivées le même jour et comptabilisant 104 oiseaux détenus par deux particuliers. Différentes espèces en faisaient partie : des Grosbecs casse-noyaux, des Linottes mélodieuses, des Chardonnerets élégants, des Sizerins flammés, ou encore des Bouvreuils pivoines. Ces oiseaux, dissimulés chez des particuliers de la région de Bastogne, sont arrivés au centre dans un état pitoyable. Un grand nombre d’oiseaux ont la gale aux pattes et leurs ailes ont été éjointées. Si certaines plumes pourront repousser, pour d’autres ce ne sera pas le cas. Le premier os de l’aile ayant été coupé, certaines plumes ne repousseront jamais. Nous devons encore attendre plusieurs semaines afin de voir quels oiseaux sont condamnés définitivement.”
Témoignage de Juliette Economides, gestionnaire du CREAVES d’Andenne
“Au mois de mars 2024, un agent de l’UAB m’a amené un Verdier d’Europe qu’un particulier avait capturé. Afin de le faire passer pour un Verdier d’élevage, ce dernier lui a apposé une bague frauduleuse. Il a tellement serré la bague que la bague est rentrée dans sa chair et a sectionné les tendons entraînant une nécrose. Après une dizaine de jours, nous avons dû nous résoudre à faire amputer la patte au niveau de la cheville (donc couper le tarso métatarse) par la vétérinaire du centre. Après trois semaines de soins, il a pu malgré tout être relâché.”
Les CREAVES et l’UAB, une collaboration essentielle
On le voit, la collaboration entre les CREAVES et l’UAB est cruciale pour lutter efficacement contre le braconnage en Belgique. Pour renforcer les liens, et éclaircir de nombreuses questions pratiques, une rencontre entre des représentants des 19 centres de soins wallons et un agent de l’UAB a été organisée en octobre dernier par la Coordinatrice des CREAVES de la Ligue. De quoi susciter une collaboration encore plus efficace entre ces structures pour l’année 2025 !
Agissez, vous aussi, dans la lutte contre le braconnage de la faune sauvage !
Si vous constatez des activités suspectes autour d’une éventuelle capture d’oiseaux ou de mammifères sauvages, vous pouvez en avertir la Ligue, ou rapporter les faits avec le plus de détails possibles directement à l’UAB au numéro 081/33.51.87.
