Saviez-vous qu’il existe en Belgique, un cervidé encore plus petit que le chevreuil ? Il s’agit du Muntjac de Chine, aussi appelé Muntjac de Reeves.
Comme son nom l’indique, ce mammifère est originaire d’Asie et plus précisément de Chine continentale ainsi que de l’île de Taïwan. L’espèce a été décrite pour la première fois par le naturaliste John Reeves en 1812 qui lui donna son nom. Elle fut ensuite introduite en Angleterre pour peupler notamment le parc de l’abbaye de Woburn, dans le Bedfordshire. A cette époque, l’animal était très prisé principalement dans un but ornemental. Beaucoup de particuliers désiraient en détenir sur leur propriété. Mais très rapidement, plusieurs individus s’échappèrent de l’abbaye et furent rejoints par d’autres en provenance de différents parcs en Angleterre. Plusieurs autres pays européens furent eux aussi attirés par cet animal étonnant. Malheureusement pour lui, le Muntjac est rapidement devenu un animal très convoité du fait de sa particularité, des dents qui s’apparentent à des défenses et qui dépassent de sa bouche un peu à l’image d’un tigre à dents de sabre. Courant du 19ème siècle, ce petit cervidé chinois colonisa le centre et le sud de l’Angleterre puis le pays de Galles. Aujourd’hui, il est présent en Angleterre, France, Belgique et aux Pays-Bas. Sa petite taille ont rapidement fait de lui un objet de curiosité mais au-delà de l’esthétisme, son importation fut motivée pour des raisons cynégétiques. Le fait d’importer une nouvelle espèce pour la chasser n’est pas anecdotique même à notre époque. Plusieurs espèces telles que le daim, le mouflon de corse, la perdrix rouge, le faisan doré ou vénéré, le cerf de Hongrie ou encore le lièvre de Pologne sont aujourd’hui bien présents en Belgique pour ces mêmes raisons.
Comment ce petit mammifère a-t-il pu coloniser une partie de l’Europe ? Le Muntjac dispose d’un grand nombre de prédateurs en Asie (léopards, tigres, dholes, chacals, pythons, crocodiles) mais en Europe et en Angleterre, son seul prédateur potentiel est le renard roux. Ce nouveau contexte l’a rendu bien moins farouche dans ce dernier pays que dans sa zone de répartition d’origine. Avec le retour du loup en Belgique et aux Pays-Bas, on peut penser que la présence d’un nouveau prédateur puisse avoir un impact sur les populations bien que pour l’instant, nous ne disposons pas d’élément le confirmant.
L’autre facteur, qui joue en sa faveur, est qu’il s’agit d’une espèce assez peu exigeante écologiquement. Sa petite taille et son régime alimentaire lui permettent de s’adapter rapidement aux différents milieux qu’il rencontre.
Enfin, son mode de reproduction est plutôt favorable à l’établissement d’une population dans une nouvelle région. En effet, le Muntjac est sexuellement mature dès la première année de sa vie, à l’âge de 8 mois pour les femelles. Ce processus est donc relativement rapide. A titre d’exemple, la maturité sexuelle du cerf élaphe n’arrive que vers l’âge 18 mois pour les mâles et avoisine les 2 à 3 ans pour les femelles. Le chevreuil se situe entre les deux espèces précitées : 12 mois pour les mâles et 14 mois pour les femelles. Ça ne s’arrête pas là, la gestation de la femelle Muntjac est comprise entre 209 et 220 jours (soit plus courte que toutes les autres espèces de cervidés) et elle donne naissance à 1 ou 2 petits par portée ! Elle ne devra pas s’occuper du faon bien longtemps puisque le juvénile sera totalement sevré à l’âge de 2 mois et indépendant à 6 mois ! La cerise sur le gâteau, c’est que cette espèce est polygame, le mâle peut se reproduire avec plusieurs partenaires au cours de l’année et la femelle est capable de mettre bas tous les 8 mois.
Face à un processus de reproduction aussi fertile que celui du Muntjac, on peut aisément comprendre pourquoi les effectifs ont littéralement explosé en Angleterre. Les dernières estimations, qui datent du début des années 2010, avoisinent le million d’individus vivant en totale liberté. On peut aussi imaginer les dommages induits par sa présence sur les cultures, les forêts et les espèces natives. La circulation routière n’est pas en reste puisque le nombre d’accidents impliquant cet animal est significatif pour ce pays. Au regard de l’expérience britannique et sur la base d’une analyse de risque, les Etats membres européens ont décidé de l’inscrire en 2016 sur la liste des espèces exotiques préoccupantes pour l’Union européenne, demandant la prise de mesures préventives à son expansion et en restreignant sa captivité aux seuls zoos habilités. Il en va donc de même pour la Belgique où il est considéré comme une espèce exotique envahissante. Heureusement, les populations de muntjacs semblent relativement stables ici. Cependant, son statut européen autorise sa chasse.
Source : http://biodiversite.wallonie.be/servlet/Repository/?ID=33352 “Les mammifères non indigènes rencontrés à la chasse Espèces invasives en Wallonie” Portail biodiversité du Service Public de Wallonie