Les députés wallons vont entrer cette semaine dans le vif du débat sur le Code de Développement Territorial (CoDT). La société civile wallonne s’est émue des reculs pour la nature que contient le projet déposé. À l’invitation de huit associations, et en moins de 10 jours, 13.000 citoyens ont lancé un appel clair à revoir les textes !
Corentin Rousseau, directeur de la LRBPO, décrypte : « La mobilisation est exceptionnelle pour un sujet aussi technique, et sur un laps de temps aussi court. Elle illustre l’engouement fort de la société civile pour que le développement territorial laisse une place importante à la nature. Les nombreux commentaires postés montrent par ailleurs une réelle connaissance du sujet par les signataires, au-delà d’une simple participation émotionnelle. »
Touché par la mobilisation, le Ministre Carlo Di Antonio assure, notamment sur les réseaux sociaux, partager les mêmes objectifs. Joëlle Huysecom, directrice chez Natagora, analyse : « On sent une volonté de bien faire et de rassurer chez le Ministre Di Antonio, mais ses propositions actuelles ne répondent pas à la demande des citoyens de voir la biodiversité mieux protégée par le CoDT. Il propose en effet de légiférer partiellement par voie d’arrêtés, tandis que c’est bien une protection plus forte, dans le décret même, que nous demandons pour les haies et les zones humides. Nous avons fait des propositions concrètes, elles sont sur la table de la Commission de l’Environnement du Parlement wallon. »
Sur les objectifs du CoDT, les associations, largement soutenues par la société civile, demandent que la conservation et le développement du patrimoine culturel, naturel et paysager soient des objectifs clairs du développement territorial, comme indiqué dans l’ancienne législation. Elles insistent sur 5 points principaux :
Les haies et vergers hautes-tiges : Refuges de la faune sauvage, aides à l’agriculture, barrières contre les inondations et coulées de boues, leur protection est un des points les plus problématiques. Globalement, les associations ne veulent aucun recul par rapport à leur protection actuelle, contrairement à ce qui est proposé. Elles insistent pour faire rentrer la protection des haies et alignements d’arbres dans le corps du décret (comme pour les « haies et arbres remarquables ») et proposent d’y ajouter les vergers hautes-tiges (dont 99% ont disparu au cours du siècle passé).
Les modifications du relief du sol : Sous ce vocable technique se cache notamment les atteintes aux mares et zones humides, repères menacés de biodiversité. Une proposition d’amélioration a été faite, en définissant la « modification sensible du relief du sol », ce qui n’existait pas auparavant. Mais cette définition ne se retrouve pas non plus dans le décret. Par ailleurs, les associations demandent une meilleure prise en compte des sols les plus fangeux (sols hydromorphes) et l’obligation d’un permis pour drainer les zones humides.
Les cultures de sapins de Noël en forêt : Le monde environnemental n’est pas favorable à cette idée. Il demande des garanties strictes de contrôle de leur impact environnemental : pas d’implantation en milieux d’intérêt biologique ou en lieu et place de forêts feuillues, pas d’herbicides ni de régulateurs de croissance. Et en milieu agricole, elles doivent faire l’objet d’un permis d’urbanisme, notamment pour éviter de perturber des sols sensibles et marginaux et ne pas détruire les prairies à haute valeur biologique.
L’équilibre entre zones urbanisables et non urbanisables : Le CoDT doit être garant de cet équilibre et ne pas introduire de dispenses au risque d’un fort recul environnemental. Sur ce sujet aussi, associations et citoyens demandent des garanties dans les zones d’enjeu régional et d’enjeu communal où l’urbanisation, fortement facilitée, va devenir débridée.
Enfin, les associations demandent que le concept de « réseau écologique » soit intégré dans le décret. À ce stade, la « structure territoriale » proposée dans les schémas de développement du CoDT ne reprend que les sites reconnus en vertu de la loi sur la conservation de la nature. Mais, à côté des pôles urbains et ruraux, des enjeux économiques et des réseaux de transport, la structure territoriale doit identifier les zones à enjeux patrimoniaux écologiques. Un « réseau écologique », formellement nommé dans le texte, doit donc reprendre les zones centrales, les zones de développement, les zones de liaisons et les zones de relais.
La Ligue Royale Belge pour la Protection des Oiseaux, Natagora, Inter-Environnement Wallonie, Ardenne et Gaume, les Cercles Naturalistes de Belgique, Jeunes et Nature, les Naturalistes de la Haute-Lesse et WWF Belgium.
> Lien vers la pétition en ligne : http://bit.ly/appelcodt