L’homme & l’oiseau 1/2015

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SOMMAIRE

Edito 4
1922-2015 : 93 années de combats 6
Je suis charlie 9
La chasse en question 10
Pouvoirs publics et nature 18
Homme & oiseau 22
Notre Centre nature 24
Nouvelles de nos réserves 26
Lu, vu, et entendu 29 & 43
Oiseaux dans le monde 30
Trafic 42
Vient de paraître 45
L’Oiseau de l’année 2015 46
Ornithologie 48
La ligue en action 50
Biodiversité 52
Concours photo 56
Agenda 58
Recueillir • Soigner • Relâcher 59

EDITO

La faute à qui…?

Les corvidés comme boucs émissaires de la perte de biodiversité de notre environnement.

Vous l’aurez constaté, le nombre d’espèces d’oiseaux observables autour de chez vous, dans votre quotidien, est en chute libre depuis quelques dizaines d’années. Bien sûr, quelques espèces de mésanges, le merle ou le ramier sont encore communs. Mais où sont donc passés les moineaux ou les hirondelles ? Où se cachent les autres oiseaux, communs autrefois, qu’ils soient granivores ou insectivores ?

Eh bien, il ne faut pas chercher très loin selon certains, c’est de la faute des corneilles et des pies, ces pilleurs de nids ! C’est tout comme pour la disparition du lapin ou de la perdrix : c’est la faute aux « becs-crochus », selon les chasseurs. Comme c’est la faute du blaireau s’il y a des dégâts dans les champs de maïs. Et puis il y a encore les espèces exotiques invasives, la grande menace récemment identifiée pour la perte de notre biodiversité. Il faut les éradiquer, mais pourquoi ne pas commencer par interdire leur transport, leur vente et leur détention ?

Selon Vittorio Hösle (1), « Le développement démographique, le réchauffement de l’atmosphère, l’augmentation du taux de produits chimiques toxiques dans l’eau, l’érosion des sols, l’amincissement de la couche d’ozone, la diminution des ressources alimentaires, l’amoindrissement de la biodiversité, tous ces phénomènes conduisent nécessairement à une situation qui sera porteuse de catastrophes écologiques ».

Et si nous interrogions nos propres comportements pour connaître le vrai coupable ?

A l’échelle de nos jardins et de nos campagnes, cette catastrophe est déjà arrivée. Mais, comme il est facile d’accuser les autres, par ignorance ou par intérêt !

Par ignorance, lorsque nous usons et abusons de pesticides et d’herbicides dans les jardins, tout en plaçant des nichoirs pour des oiseaux qui ne trouveront rien à manger au printemps.
Par intérêt, lorsque le blaireau est accusé par les chasseurs, à la place du sanglier, pour ne pas devoir payer les dégâts aux cultures. Ou encore parce que nos campagnes sont devenues les usines à ciel ouvert que sont les grandes monocultures, aux sols compactés, et dopées aux engrais chimiques afin d’accroître sans cesse leur rentabilité financière.

Et si, plutôt que d’accuser d’autres espèces animales, nous interrogions nos propres comportements ?
Mais oui, nous, les hommes, sommes à l’origine de ces déséquilibres dans la nature. C’est notre mode de vie, basé sur la croissance économique effrénée, qui en est la cause. Nos gouvernants n’ont d’ailleurs pas d’autre mot à la bouche pour mettre fin à la crise économique : il faut de la croissance afin de diminuer le chômage. Tout un chacun sera d’accord avec ces objectifs de hausse de l’emploi, mais pas de n’importe quelle façon. Si c’est la croissance de la consommation matérielle et de la production continue qui est visée, plutôt que le bien-être, alors non. En effet, cette croissance- là s’accompagne de la recherche du coût de production le plus bas possible, ce qui répond certes à la demande des consommateurs mais conduit inéluctablement, à terme, à la mécanisation, à la robotisation, à l’informatisation, à la délocalisation, au détriment de l’emploi local. Et en même temps, les ressources naturelles (énergie et minerais, l’eau, les sols, la biodiversité) sont exploitées sans vergogne, l’environnement est pollué, la déforestation de la planète se poursuit et le taux de CO2 contenu dans l’atmosphère ne baisse toujours pas.

Réfléchir à la place de l’homme dans la nature

Mais comment redresser la situation, car il ne s’agit évidemment pas de retourner vivre dans des grottes ! Sans doute faut-il revoir nos systèmes de valeurs en réfléchissant à la place de l’homme dans la nature afin de mieux justifier rationnellement nos actions individuelles et collectives.
Cela doit commencer chez chacun d’entre nous.

Dans nos jardins, en diminuant la surface des pelouses (2), ces grandes monocultures vides de faune; en y laissant des coins de nature sauvage, en renonçant à l’usage des biocides et aussi en surveillant votre chat, ce petit félin grand prédateur !

Ou encore en achetant des aliments produits localement, en isolant nos maisons…

Et puis en cessant d’accuser les pies et les corneilles de banaliser l’avifaune. Ces espèces opportunistes ont au moins le mérite de s’adapter à nos environnements dégradés

Emmanuel Verhegghen, Administrateur de la LRBPO.