Alors qu’autrefois la Perdrix grise était une espèce très commune, présente partout en Wallonie, elle se trouve aujourd’hui parmi les espèces en voie d’extinction. C’est pourquoi le Conseil d’État a estimé que cette espèce ne pouvait plus être purement et simplement soumise à la chasse. D’où le plan de gestion élaboré par le ministre Willy Borsus (MR) pour satisfaire l’égoïsme des chasseurs.

Résultat d’une mauvaise gestion

La raréfaction de la Perdrix résulte principalement de pertes très importantes d’éléments de son habitat (manque de haies pour s’abriter, de friches ou de bandes herbeuses où dissimuler le nid, de cultures non traitées maintenant la présence de plantes adventices, riches en graines et en insectes). A cette disparition d’éléments essentiels sont venues, s’ajouter des pratiques de chasse qui dénaturent (lâchers importants de Perdrix issues d’élevages, trop souvent porteuses de germes pathogènes et amenant des modifications génétiques indésirables dans les populations sauvages).

Bien que la régression de la Perdrix soit signalée depuis nombre d’années, nous n’avons pu obtenir l’arrêt de cette chasse qu’en 2019. La difficulté, pour la Ligue, d’obtenir cet arrêt par le Conseil d’État, résultait de ce que les prélèvements de Perdrix n’étaient plus autorisés que dans des territoires assujettis à un conseil cynégétique, celui-ci étant censé veiller à une bonne gestion des territoires et des prélèvements afin que l’espèce Perdrix ne régresse plus mais se développe à nouveau. La gestion organisée par ces associations de chasseurs s’est donc révélée nettement insuffisante.

On reprend les mêmes

Bien que, suivant cet échec des conseils cynégétiques, le Gouvernement aurait dû mettre fin à cette chasse non durable, nos ministres wallons, indécrottables de leur peu d’attention à la conservation de la Nature, ont encore inscrit la Perdrix grise dans le nouvel arrêté quinquennal sur la chasse de 2020 à 2025. Et, de nouveau, l’organisation de cette chasse, abusive envers une espèce très menacée, est confiée aux mêmes associations de chasseurs. Ce qui diffère est l’obligation, donnée à ces conseils cynégétiques, de dévoiler le plan triennal de gestion qu’ils comptent appliquer dans chaque territoire et de le faire approuver par le directeur général du Service public de Wallonie Agriculture, Ressources naturelles et Environnement.

Rien n’est imposé quant aux étendues minimales que devraient avoir les territoires, ni quant au pourcentage de leur surface à réserver à la faune des champs. Pour les lâchers de repeuplement il n’est pas prévu d’échelonnement ni de suspension de chasse, nécessaire durant plusieurs années, pour permettre aux oiseaux de s’adapter à l’environnement et commencer à s’y reproduire en suffisance. Sans être assorti d’un arrêt conséquent de la chasse, le lâcher est un faux repeuplement.

Haro sur les prédateurs

Le référentiel de gestion, annexé à l’arrêté du 10 juin, du ministre Willy Borsus, indique les prédateurs importants à détruire : les renards, les chats harets, les fouines et putois, ainsi que les corneilles noires et les pies.

C’est là une liste d’espèces déclarées prédatrices de la Perdrix grise qui ne correspond pas à ce qu’indique l’ouvrage « Les Colombidés et les Gallinacés », édité par le Patrimoine de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique : « A l’exception de la femelle de l’Epervier, de l’Autour et du Faucon pèlerin, les prédateurs (Mustélidés, Renards et les autres rapaces que les trois précités) sont peu à redouter pour les Perdrix ; par contre, les chiens et les chats affranchis sont beaucoup plus à craindre pour les nicheurs et leurs couvées ».

Il résulte de cette comparaison que seul le Chat haret devrait faire l’objet d’une destruction.

C’est un plan boiteux

Le manque de volonté politique envers la Conservation de la Nature fait que les mesures agri-environnementales, indispensables à la faune des champs, restent limitées à peine à 1,5 % des terres agricoles, au lieu d’en couvrir au moins 7 à 10 %. Par son plan pour continuer d’ouvrir la chasse à la Perdrix, la Région wallonne cherche manifestement à masquer sa responsabilité dans ce manque d’habitat suffisant. La chasse à la Perdrix grise devrait être suspendue tant qu’un minimum d’éléments essentiels ne soit atteint, permettant à l’espèce de se répandre de nouveau naturellement dans nos campagnes. Actuellement, il n’est que peu de territoires présentant encore un habitat à peine suffisant pour la Perdrix grise. Continuer d’autoriser des prélèvements de chasse va empêcher ces petites populations de pouvoir essaimer pour recoloniser naturellement d’autres territoires.

La Perdrix grise est « res nullius ». Sa sauvegarde n’est pas de la maintenir égoïstement en la « propriété » de quelques chasseurs.